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Produire du lait et du fromage de chèvre toute l’année

Anne et Marc Furrasola et Laurent Chabanon (à droite) élèvent leur troupeau de chèvres sur un plateau juché à 850 mètres d’altitude, situé dans l’aire d’appellation Banon. Cette dernière impose 210 jours de pâturage annuel.

Producteurs de lait de chèvre classé en appellation Banon, les associés du Gaec de la Bellimure conduisent deux lots, l’un en hiver, l’autre en été.

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Pour capter la clientèle, Laurent Chabanon, Marc et Anne Furrasola, tous trois associés au sein du Gaec de la Bellimure à Saint-Christol d’Albion (Vaucluse), produisent du lait de chèvre 12 mois sur 12. Leur lait bénéficie de la renommée de l’appellation Banon. Ancien technicien caprin dans l’Allier, Laurent est à l’origine de la création de l’exploitation en 1998. Installé hors cadre familial, il choisit d’emblée de diviser le troupeau en deux lots, l’un pour la produire l’hiver, l’autre pour l’été. « C’était la condition de mon installation, explique-t-il. La laiterie de Banon a besoin de lait en hiver. Or, il est assez rare d’en trouver ici. » Ce lait est bien mieux rémunéré que celui du printemps, avec un écart de de 345 €/1 000 litres.

20 % du lait transformé

L’éleveur a commencé par un troupeau de 110 alpines chamoisées. Il commercialisait toute sa production auprès de la laiterie. Les choses vont changer avec l’arrivée des deux associés. Marc le rejoint en 2003. Le troupeau monte alors à 190 bêtes. Son épouse, Anne arrive en 2015, avec dans ses bagages, un projet de d’atelier de transformation pour développer la vente directe. Assez vite, le Gaec se fait une clientèle contente de pouvoir acheter le fromage toute l’année. Aujourd’hui, les éleveurs gardent 20 % du lait produit pour la transformation. Le troupeau est redescendu à 160 chèvres.

Pour décaler les périodes de naissance, les éleveurs utilisent le désaisonnement. « Les chèvres entrent en chaleur seulement en automne, explique Laurent. Elles ont besoin des longues journées d’été suivies de jours plus courts à la fin de l’été pour déclencher leurs hormones sexuelles. » Pour orienter les périodes de chaleur au printemps, les éleveurs éclairent la chèvrerie du 15 novembre au 15 février, de 6 h à 20 h, puis de 22 h à minuit, soit 18 heures de lumière. Ensuite, du 15 février au 15 avril, lorsque les journées rallongent, la durée d’éclairage est de 6 h à 20 h, soit 14 heures de lumière. Cette différence de quatre heures est suffisante pour que les chèvres perçoivent des jours courts.

Les chèvres adultes sont désaisonnées par la simulation de longues journées au moment où elles diminuent naturellement. (©  Chantal Sarrazin)

« Le désaisonnement fonctionne sur 80 % des animaux »

À l’issue de ce protocole, à la fin de mars ou au début d'avril, les chèvres viennent naturellement en chaleur. « Cela fonctionne sur 80 % des animaux, expose Marc. Les chèvres non réceptives continuent leur lactation sur une période prolongée, sans être taries. » Les saillies sont regroupées jusqu’au 15 mai et les mises bas ont lieu à l’automne. Ce lot de chèvres produit le lait d’hiver.

Les chevrettes nées de ces mises bas, et les chèvres sur lesquelles le désaisonnement n’a pas fonctionné, produisent le lait d’été. « Les chevrettes font un cycle de production normal durant leur première année, explique Laurent. Elles sont présentées aux boucs à un an d’âge, et mettent bas au printemps de l’année suivante. Avec les chèvres non taries, elles couvrent ainsi la majorité de nos besoins en été. » Les chevrettes ne sont désaisonnées qu’en seconde année de lactation. Grâce à ces cycles, l’intégralité du troupeau assure l’approvisionnement en lait de la ferme au printemps.

210 jours de pâturage

Pour le renouvellement, les associés font inséminer 50 chèvres chaque année. Cette opération intervient en même temps que les saillies du reste du troupeau, afin de regrouper les naissances. « Nous n’achetons aucun animal à l’extérieur, souligne Marc. Cette sélection nous permet de cibler le taux de matière grasse et protéique, ainsi que la conformation des mamelles. Nous recherchons des mamelles bien attachées au corps pour qu’elles ne s’accrochent pas aux ronces lors des déplacements en plein air. »

Le cahier des charges de l’AOP Banon impose en effet 210 jours de pâturage annuel sur des prairies et des parcours locaux (bois, landes…). Ces apports sont complétés par des fourrages produits sur la ferme. En outre, les laitières reçoivent toute l’année 600 grammes de concentré par jour à 20 % de matière protéique. Sur cette ferme perchée à 850 mètres d’altitude sur un plateau sec et caillouteux, la vraie difficulté c’est la production de fourrage. « Ici, nous ne pouvons faire qu’une coupe d’herbe par an », commentent les deux éleveurs.

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